Belgique belgique

le texte qui suit j'aurai bien voulu l'écrire moi-même, mais mon écriture n'est pas publique et souvent (historiens de l'art = artiste frustré) je trouve que les autres ont déjà dit les choses, je ne retournerai pas l'Urinoir, si vous voyez ce que je veux dire. enfin tout ca pour dire que mon petit marcel d'où tu es tu dois bien rire...en 2007 ton fan club est toujours vivant, Longue vie à la Belgique!!!

Nous savons qu’au pays des aveugles, les borgnes sont rois. Ce pays-la est le mien. Et sans doute suis-je un simple citoyen de la ville de Bruxelles. Mon père est flamand. Ma mère est wallonne. Ce qui m’a sûrement inspiré quelques idées bizarres comme celle de me crever les yeux.
Cela est-il vraiment tragique ? Serait-on si mal dans la peau d’Œdipe à partir du moment ou le jour se fait dans l’esprit et que la langue nomme un complexe par son nom ?
Au fait mes yeux sont bons. L’acte de me les trouer n’a pas suivi l’idée. Le bon sens à triomphé de la tentation. Je ne le regrette pas, bien que je conçoive qu’un aveugle qui écrirait un article de journal passerait facilement pour un voyant et qu’il ne m’eut pas été désagréable que le lecteur me comparât à un prophète. Un aveugle ou un manchot n’éprouvent guère de difficultés à exploiter le plaisir qu’éprouvent les biens portants et les biens pensants à la vision de son infirmité. Tirer parti de son talent est bien plus profitable que d’en avoir. Mon talent, je crois l’avoir dit, est celui d’être belge. Fil blanc cousu dans un tissu de confusions. Hélas il ne m’échappe pas que l’écriture relève parfois d’un aspect névrotique, comme la peinture, comme la musique. Enfin je m’efforcerai de ne pas dire du mal de mon pays, puisqu’il fait partie du Benelux, et le Benelux du concert de l’Europe.
Loin de moi, cette idée de faire entendre une fausse note et de profiter lâchement du sujet qui m’occupe – la santé mentale- pour attaquer les structures du meilleur des mondes.
Le Bon Sens, je l’espère, ne me fera pas défaut. Que le lion de Flandre, le coq wallon et les anges tutélaires veillent sur ma plume pour le bien et le confort de tous.

Marcel Broodthaers. C.1961

                                         femurs d'hommes belge et francais